Au troisième étage, alors que j’attendais l’arrivée de la commissaire d'exposition Lê Thiên Bảo, l’un des fondateurs et directeurs de la galerie, Anthony Phuong, me rejoint pour me présenter l’exposition, « la première de ce genre » à Paris, voire en France. Devant nous, les six œuvres de Oanh Phi Phi (1979, États-Unis) ne cessent d’attirer mon regard. Devinant ma fascination, le directeur m’invite à toucher les œuvres. Grande habituée des musées et du respect imposé par la scénographie de leurs expositions (en général de petits objets de ce genre sont placés sous vitrine et, même cette vitrine, on ose à peine l’effleurer, de peur d’y laisser de trop vulgaires traces de doigts), cette suggestion me fait écarquiller les yeux. Anthony Phuong me rassure : « C’est vraiment fait pour être pris en main ». D’un geste peu assuré, je tends donc mes mains vers les petits formats peints par Oanh Phi Phi. Ces surfaces noires brillantes me rappellent vaguement quelque chose. « Son but, c’est de faire comme si nous étions dans un Apple Store… Sous la plaque de fer, il y a un aimant permettant de remettre l’œuvre sur son socle . » Sur ces écrans immobiles, l’hyperréalisme des sujets (cartographies du Vietnam et de la Chine, scène de déjeuner rappelant les natures mortes contemporaines que sont les photographies de nos repas, postés sur Instagram…) tranche avec la longue tradition des scènes de genres stylisées des laques vietnamiennes, qui font bien souvent le succès des maisons de vente aux enchères françaises (on pense, par exemple, à la récente adjudication à 1 004 400€ d’un paravent de Nguyễn Gia Trí à l’Hôtel Drouot).
Vietnam et V.I.E contemporaine, une exposition de groupe à Paris.
Eléonore Tran, Les Cahiers du Nem, 30 March 2023